Sur la route du Monastère

Par Tuis (écrit non daté mais évalué en 2001)

Forêt
Illsutration : Alan Lee - Merlin dreams

Tout commença alors que nous étions paisiblement en train de boire un verre ou deux en compagnie de Jaahl dans sa taverne de la Baie, lorsque un grand homme entra. Il lança à la cantonade : “Aventuriers de tout poils, du travail nous attend”

Je glissai dans l'oreille de ma compagne Elpsbeth : “Ha, c'est pour nous ça !”. Si j'avais su où tout cela allait nous mener ! “Le contre-maître de la scierie, le cher Zeram, souhaite construire une route entre le monastère et la clairière de la forêt du nord, là où Jaspe s'encroûte. Il nous faut de fortes mains pour ce travail.”

Toujours aussi rabat-joie, j'ajoutais à la cantonade : “Heu, ahem, pardon messire, mais ne manque-t-il pas un petit renseignement dans ce que tu viens de dire ?”
“En effet, et j'attendais que le plus cupide d'entre vous me le rappelle, dit-il en me regardant avec un grand sourire narquois, ce travail est fort bien payé. Mais attention, il comporte des risques. Zeram a apparemment entendu parler de quelques personnes qui sont contre la construction de cette route.”

Elpsbeth me prit par l'épaule et me dit : “Écoute mon vieux. C'est bien beau de poireauter ici en dépensant nos dernières économies, mais je trouve que ce travail vient parfaitement à point nommé.”
Puis à voix haute. “Nous y sommes. Voici mon compagnon bougon, le futur renommé Tuis. Et je suis Elpsbeth, futur bonne magicienne.”

“Et moi, c'est Jarekh. Bienvenue à vous deux”

C'est ainsi qu'eut lieu notre rencontre. Je laisse passer les quelques jours suivants peu intéressants, ainsi que toutes mes recherches pour obtenir une hache qui n'ajouterait rien à nos aventures épiques. Quoi qu'il en soit, trois jours plus tard, nous étions dans la scierie, face à Zéram qui nous donna nos dernières instructions.

“Voici les plans. Ils ne sont pas complet, pour la deuxième moitié, vous devrez aller au port de la Baie, un homme du Monastère vous contactera pour vous remettre la deuxième moitié. Je vous conseille d'être très prudents, de nombreuses personnes sont prêtes à tout pour que cette route ne voit pas le jour.”
“Encore un sale coup de Barg… Aïe!” Elpsbeth m'écrasa le pied de son talon pointu, ce qui eut pour effet de couper net ma remarque désobligeante…

Lorsque le soir vint, nous étions épuisés. Peut-être aussi n'étions nous pas vraiment équipés pour le travail. Jarekh n'avait qu'une belle épée ou une hache en bois et Elspbeth n'avait même que ses sorts qu'elle maniait encore avec un niveau balbutiant pour m'aider, moi, qui avait réussi à acheter une vraie hache à crédit auprès de Galgard. Malgré notre état d'épuisement, nous avions établi des tours de garde et chacun réussit à dormir du mieux qu'il put.

Les problèmes n'arrivèrent que la deuxième nuit… pendant le tour de garde de la seule femme de notre compagnie bien sûr…
Elspbeth prenait le dernier tour et le ciel commençait à s'éclaircir lorsque le drame arriva. Elspbeth fut attaquée par un énorme loup gris qui abattit sa gigantesque masse sur notre malheureuse veilleuse. Elle ne put que pousser un cri de surprise avant de s'évanouir sous le choc et le poids de la bête. Jarekh entendit aussitôt le cri d'Elpsbeth, et, rapide comme un chef, sauta sur pied son épée à la main. Voyant tout de suite la situation, il courut vers le loup et lui plongea la lame dans le corps avant que celui-ci n'ait le temps de se retourner. Le loup réussit pourtant à le blesser légèrement avec ses griffes avant de s'effondrer terrassé. Le cri d'Elpsbeth m'avait aussi réveillé mais… je suis un peu plus lent le matin… Encore tout embrumé de sommeil, je me levai, prenai rapidement ma hache que je jetai violemment sur le dos du loup avant de m'apercevoir qu'il était déjà mort…

Piètres magiciens ou guérisseurs l'un et l'autre, nous ne réussîmes pas à réveiller Elspbeth. Nous n'avions donc qu'à attendre son réveil, qui heureusement ne tarda pas. Nous commençâmes la troisième journée de travail avec bien peu d'entrain, regardant toujours dans notre dos si un danger ne venait pas.

Cela dit, la route avançait bien et il allait nous falloir bientôt passer par la Baie pour prendre les plans de la deuxième moitié de la route. C'est ce que nous fîmes le soir même. Nous arrivâmes à la Baie à la nuit tombée et nous décidâmes de rester pour cette nuit à la taverne de Jaahl. Jarekh prit quelques instants pour passer à l'église rendre visite à son ami Arilan (vous savez, le vieux prêtre tout encroûté…).
Je passai moi par la boutique de Galgard pour le remercier de la hache (rassurez-vous, j'ai réussi à payer ma dette depuis), tandis qu'Elpsbeth allait tout droit chez Jaahl pour se réchauffer dans la saine atmosphère embrumée de la taverne.

Chacun notre tour, nous fûmes victime de la même personne. Il se faisait tard et il y avait peu de monde dans les rues (d'ailleurs j'en profite pour faire une réclamation : comment diable une belle cité comme la nôtre peut supporter ces lampadaires vieillots qui n'éclairent pas à deux mètres. Et après on se plaint des voleurs…). Je fus tout d'un coup bousculé par un assez vieil homme qui portait une grande cape noire. Surpris par le choc, je tombai à la renverse, les pieds dans le caniveau. Le vieil homme se retourna et commença à m'invectiver.

“Ceci est le dernier avertissement. La route du Monastère ne sera pas construite ! Arrêtez immédiatement votre travail ou vous le paierez de votre vie.”

Une fois ces paroles prononcées, l'homme se retourna et continua son chemin pour disparaître rapidement derrière un bâtiment.
Une fois de retour à l'auberge, j'appris que la même chose était arrivée à Jarekh et Elspbeth, chacun dans les cinq minutes précédentes…

Mais il en faut plus pour abattre des héros et nous décidâmes bien entendu de continuer (enfin à deux voix contre une, je n'ai réussi à les décider à abandonner ici…). Le lendemain matin, nous rencontrions le garde de Zeram comme prévu sur les quais et il nous remit le deuxième plan. Après cette bonne nuit de sommeil dans un bon lit douillet, nous nous sentions d'attaque et le tronçonnage de bois avança rapidement jusqu'au soir.

Tout se passa très bien, de même que le jour suivant. A la fin de la journée suivante, nous étions assez fatigués et peut-être un peu moins sur nos gardes. En tout état de cause, Elspbeth qui travaillait à télékinéser les arbres coupés pour les mettre sur le coté de la route, n'entendit pas le danger venir : elle reçut de plein fouet un choc mental terrifiant qui la mit à terre. Nous vîmes aussitôt l'assaillant : c'était le vieil homme aperçu à la Baie.

“Je suis Fletcher, et je vous avais pourtant prévenu. Je vais donc être obligé de mettre un terme à votre mission de manière assez violente.” Il lança un nouveau jet d'énergie en direction d'Elpsbeth qui perdit connaissance.

Je lançais à l'égard de Jarekh : “Il nous attaqué en traître. C'est donc qu'il n'est pas si sûr de lui. A l'aaaatttttaaaaque!”

Fougueux comme pas deux je m'élançai à l'assaut de ce Fletcher en lui balançant un bon coup de hache. Mais elle fut arrêtée par une mystérieuse barrière invisible qui l'empêcha d'atteindre la tête de Fletcher que j'avais, il faut le dire, remarquablement bien visé. Jarekh sortit sa grande épée mais elle fut elle aussi arrêtée par la même barrière. Nous essayâmes à peu près tous les coups possibles de tous les côtés sans trouver de faille à la protection de l'homme.

Pendant ce temps, il n'était pas inactif et il nous lança un certain nombre de sorts que nous nous prenions dans les dents sans fléchir. Il lança même quelques tremblements de terre miniatures qui eurent pour effet de nous faire perdre l'équilibre mais aussi de réveiller Elspbeth (décidément, toujours endormie au mauvais moment celle-là…). Voyant que nos efforts ne servaient à rien, elle commença à attaquer avec ses armes magiques. On vit Fletcher plier le genou, signe qu'Elspbeth l'avait touché, mais ce n'était visiblement pas suffisant. Et notre résistance à tous commençait sérieusement à baisser…

C'est à ce moment-là que la cavalerie arriva ! Ouf, merci Lucky… Une dizaine de gardes de la foret et Zeram lui-même arrivèrent en courant. Les soldats se mirent à encercler Fletcher et l'attaquer de toute part. Zeram nous cria de battre en retraite, ce qu'il ne nous répéta pas deux fois. Pendant que les gardes manoeuvraient pour empêcher Fletcher de nous poursuivre, nous nous enfuîmes avec Zeram en direction du Monastère que nous atteignîmes rapidement.

“Vous avez fait du bon boulot. La route n'est pas complètement terminée, mais le petit morceau qu'il reste pourra être effectué par les gardes de la forêt. Vous avez réalisé la plus grosse part du boulot. Voici donc votre récompense (ndla : des espèces sonnantes et trébuchantes en grand nombre). Vous avez fait connaissance de Fletcher. Je le connais déjà depuis longtemps. C'est en fait le chef des pirates qui ont attaqué la Baie il y a de cela quelques mois. Cela fait plusieurs fois que je le poursuis et que mes gardes l'attaquent, mais sans succès. Il est protégé par une magie très puissante que nous sommes incapable d'outrepasser.
C'est pourquoi j'aimerais vous demander de vous attaquer à lui. Il existe une légende dans la forêt qui parle d'une arme ancestrale très puissante. je pense qu'avec elle, vous devriez être capable de le tuer.”

Pour une fois - peut-être étais-je trop fatigué ? -, je ne demandais pas quelle allait être notre récompense, et ce fût Elspbeth qui accepta rapidement en notre nom.

Nous passâmes la nuit au Monastère. J'essayais vainement de m'attirer les faveurs de la belle Emma pendant qu'Elspbeth et Jarekh dormaient du sommeil du juste. Le lendemain matin était un très beau jour et nous commençâmes notre recherche. C'est Jarekh qui pensa le premier à faire appel au dragon de la forêt. Si quelqu'un connaît les légendes d'Odyssee, c'est bien lui !
Aussitôt dit, aussitôt fait, nous prîmes la route nouvellement construite pour nous rendre à la grotte du dragon.
Comme d'habitude, mes connaissances furent bien utiles puisque j'avais déjà demandé à Kronberg, le maître du dragon, la permission d'aller voir le dragon (moyennant une somme mirobolante que j'avais heureusement réussi à faire baisser). Nous passâmes donc directement à la case Iria sans passer par la case Kronberg ni recevoir vingt mille pièces d'or…

Iria nous banda les yeux à tous. J'espérais qu'elle allait nous faire tout plein de choses inavouables avec les yeux bandés, mais non… Elle nous emmena simplement devant la grotte du dragon. Ce qui est déjà pas mal… Les trois plus grands héros d'Odyssee pénétrèrent donc dans la taverne du dragon Draco (pfou, quel nom de gigolo… M'enfin je lui ai pas dit, hein…).
C'est moi qui fut l'ambassadeur de notre petit groupe. Je demandais poliment au dragon s'il connaissait l'existence d'une arme ancestrale, blablabla, blablabla… J'enrobais le tout d'un bonne couche d'humilité (ben oui, il fait quand même 7 ou 8 mètres de plus que moi mon interlocuteur) et j'attendis la réponse tout comme mes camarades.

Elle ne tarda pas à arriver. En effet, Draco connaissait l'existence d'une arme ancestrale, et il savait de plus qu'elle était capable de traverser les défenses magiques de Fletcher. Impeccable, donc ! C'était sans compter sur les facéties de ce dragon : pour avoir l'information désirée, il nous demanda de répondre chacun à une énigme. Il devait y avoir une énigme de déduction, une énigme d'esprit et une énigme de connaissance. Lorsque Draco indiqua qu'il y aurait une énigme de connaissance, Elpsbeth et moi nous regardâmes mal à l'aise et nous nous tournâmes ensemble vers Jarekh avec un regard suppliant.

“Va va, ça va, j'ai compris, je vais y répondre à cette fichue question…”. La question fut “Quel a été le premier jour du 6ème siècle dans le calendrier terrien ?”. Jarekh, après avoir regardé son manuel encyclopédique qu'il emmène toujours avec lui en voyage, trouva la réponse rapidement. Vint ensuite le tour d'Elspbeth qui répondit à la question de déduction : “Que peut-on faire à tout le monde mais ne donner qu'à certain ?”. Elle trouva rapidement la réponse : c'était l'Amour. Pfou, c'était facile, avec moi à ses côtés, elle ne pense qu'à ça jour et nuit… La troisième question fut : “Que veulent les hommes qu'ils fuient quand ils l'ont ?” Après avoir longuement réfléchi, je décidais de répondre à la question sur le mode cynique (ha oui, je le fais bien ce mode là). Ma réponse l'étonna puisque ce n'était pas celle qu'il attendait, mais il l'accepta finalement : “les femmes”. Mon esprit avait été plus malin que le sien !

Chacun de nous avait donc répondu à une question et il nous donna l'information que nous étions venus chercher. L'arme capable de vaincre Fletcher s'appelle la lance de Danang. Malheureusement, cette Lance a été perdue au cours de la dernière guerre (évidemment, les armes se perdent toujours au cours des dernières guerres…). Il nous indiqua toutefois qu'Avalanche devrait être capable d'en refaire une, mais il lui faudrait pour cela l'âme d'un guerrier Dang, l'un des derniers guerriers à avoir utilisé cette Lance. Courageux comme nous étions, nous hésitâmes pas un instant et nous fonçâmes en direction de la Fournaise pour retrouver cette âme perdue (je n'oubliais pas néanmoins de remercier chaleureusement le dragon, on ne sait jamais, on en aura peut-être encore besoin plus tard).

Quelques jours plus tard, nous étions sur les pentes de la Fournaise. Il commençait à faire chaud, ça montait haut, j'étais fatigué… Tout cela pour dire que je laissais volontiers Jarekh et Elpsbeth monter seuls au sommet pour rencontrer le démon du premier cercle, le fameux Balkiel ! C'est Jarekh, notre beau parleur, qui parla avec lui. Il réussit, on ne sait comment, à l'amadouer et Balkiel nous donna sans contrepartie une âme de Dang qu'il avait encore dans son réservoir personnel. Bravo donc à notre Jarekh national pour cette leçon de diplomatie.

Nous refîmes donc le trajet à l'envers pour retourner dans la forêt près d'Avalanche. Nous lui remîmes l'âme de Dang qui reposait dans une boule de cristal opaque et elle se mit aussitôt au travail. Pendant ce temps, nous allâmes revoir Iria et lui demandâmes de nous entraîner au maniement des lances. Une nouvelle fois, je prouvais ma supériorité puisque je réussis rapidement à dominer mes compagnons dans cet art. Je les laissais alors s'entraîner et j'allais voir Avalanche. Évidemment, même Elpsbeth, pourtant plus douée pour les armes de l'esprit que pour les armes physiques avaient réussi à m'égaler après s'être entraînée un jour de plus. Jarekh par contre était décidément réfractaire, préférant toujours manier sa grande épée plutôt que le javelot que nous avait prêté Iria pour l'entraînement.

Pendant ce temps, Fletcher n'était pas resté inactif. Il sévissait sur les routes d'Odyssée, s'attaquant à tous les voyageurs qui passaient sur le chemin pour les détrousser. Une attaque fut même menée par les soldats du Fort pour l'éliminer. Mais il se réfugia alors dans les fonds de la Fournaise et aucun des soldats ne voulut le poursuivre jusque là…

Enfin, quelques jours plus tard, la Lance de Danang fut prête et nous partîmes pour le combat final. Nous retrouvâmes Fletcher aux abords de la Fournaise. Celui-ci était alors en train de dormir paisiblement dans l'atmosphère sulfurée des environs du volcan. Nous ne perdîmes pas notre temps et Elpsbeth lui enfonça profondément la lance dans le ventre.
Fletcher se réveilla aussitôt. Nous l'occupâmes, Jarekh et moi, avec quelques sorts et broutilles pendant qu'Elspbeth l'attaquait avec la lance. Celle-ci réussissait visiblement à le toucher profondément, et chaque attaque réussie d'Elspbeth lui faisait pousser un cri de douleur.
La lance était très lourde à porter, et Elspbeth fut bientôt à bout de force. Je m'empressais de lui prendre la lance pour porter les coups décisifs. C'est ce que je fis et il poussa bientôt un long râle d'agonie. Nous venions de vaincre Fletcher !!

Un hurlement de douleur se fit alors entendre depuis l'intérieur du Volcan. Balkiel, ou son maître, ne semblait pas apprécier notre acte.
Fletcher tomba à terre et une odeur de décomposition horrible se fit bientôt sentir. De la fumée sortit de ses vêtements pendant que sa chair se flétrissait rapidement. La chair tomba au sol en se détachant des os, il ne restait plus que le squelette qui mit quelques minutes à s'évaporer. Il ne restait bientôt plus que les vêtements du démon Fletcher !

Le cri de colère venant de la Fournaise laissa place à un fantastique orage qui nettoya la terre d'Odyssée de toutes ses impuretés. Notre travail étant terminé, nous décidâmes de retourner à la Baie pour retrouver la sécurité de la taverne de Jaahl…

Mon histoire est terminée. De retour à la Baie, nos chemins divergèrent après avoir participé à la descente dans les égouts de la ville contre les hommes-rats (qui fut d'ailleurs un fiasco total, certainement par ce que j'étais un peu en retard).
Elpsbeth fonda la Compagnie de la Lance en souvenir de nos aventures, Jarekh partit pour de nouvelles contrées, et moi je retrouvai mon amie Toutoune à qui j'enseignais tout ce que j'avais appris. Mais c'est une autre histoire…

background/histoires/la_route_du_monastere.txt · Dernière modification : 18/08/2022 08:07 de 127.0.0.1
Haut de page
CC Attribution-Noncommercial-Share Alike 4.0 International
chimeric.de = chi`s home Valid CSS Driven by DokuWiki do yourself a favour and use a real browser - get firefox!! Recent changes RSS feed Valid XHTML 1.0